A la suite de la crise financière de 2008, les régulateurs financiers ont renforcé leurs politiques de protection des investisseurs dans la plupart des pays. Plus spécifiquement, la plupart ont rendu obligatoire l’évaluation du profil d’investissement des clients afin de leur recommander un instrument financier en accord avec leur expertise financière, leurs objectifs d’investissement, leur situation financière et leur tolérance au risque.
Dans l’Union Européenne, cette nouvelle réglementation a été implantée à travers la directive MIFID I (Markets in Financial Instruments Directive), puis MIFID II en 2018.
L’homologue suisse de MiFID est la FinSA (Financial Services Act), nommé FIDLEG en allemand, LSFin en français et LSerFI en italien.
Cette directive est rentrée en vigueur en 2020.
Quelles sont les différences clés entre MiFIDII et LSFin concernant l’évaluation de l’adéquation client ?
La directive LSFin s’est fortement inspirée de la directive MiFIDII, à l’exception de quelques éléments dont nous donnons des exemples ci-dessous.
La segmentation client sous LSfin et MiFID II
LSfin et MiFID II font la différence entre trois types de clients : le client particulier, professionnel et institutionnel.
Les particuliers sont nommés « clients privés » en Suisse (voir article 4(1) (a) LSFin), tandis que l’UE utilise le terme de « client particulier » (article 4(1) (11) MiFID II).
Les services financiers fournis aux clients privés sont, dans les deux juridictions, plus régulés que pour les clients professionnels.
LSFin et MiFID II autorisent les clients à passer d’un plus haut à un plus bas niveau de protection si certaines conditions sont présentes, mais ces conditions sont légèrement différentes d’une juridiction à l’autre.
Par exemple, sous MiFID II, un client particulier expert en finance peut être considéré comme client professionnel.
En Suisse, cela n’est possible que si le particulier possède au moins 500 000 CHF d’actifs immobilisables ou 2 millions CHF d’actifs globaux.
Dans les deux règlementations , il est également possible de bénéficier à l’inverse d’un niveau de protection plus haut :
- Sous LSFin, les clients professionnels qui ne sont pas des clients institutionnels peuvent être traités comme des clients privés (article 5 (5) LSFin).
- Sous LSFin, les clients institutionnels peuvent passer au niveau de protection des clients professionnels (article 5 (6) LSFin).
- Sous MiFID II, les clients professionnels peuvent aussi bénéficier d’un niveau de protection supérieure.
Tests d’adéquation sous LSFin et MiFID II
Les deux règlementations MiFID II et LSfin imposent aux institutions financières d’évaluer les préférences d’investissement de leurs clients.
La vérification du caractère approprié du service (Appropriateness) se distingue de la vérification de l’adéquation (Suitability).
Dans les deux régulations :
- La vérification de l’adéquation consiste à vérifier les connaissances et expériences financières des clients, leur situation financière, leurs objectifs d’investissement, leur capacité à supporter des pertes, et leur appétit du risque.
- La vérification du caractère approprié consiste à vérifier uniquement les connaissances et expériences financières des clients
Néanmoins, ces deux tests s’appliquent dans des cas d’usage différents.
MiFID II exige un test d’adéquation pour le conseil et la gestion de portefeuille et un test du caractère approprié pour la vente directe (RTO ou execution-only) de produits complexes.
LSFin permet une plus grande flexibilité :
- Seul un test du caractère approprié du produit est demandé lors de transactions isolées
- Aucun test n’est exigé en cas de vente directe (RTO ou execution-only).
De plus, sous MiFID II, la connaissance financière ne doit pas être évaluée à travers une auto-évaluation, tandis que l’auto-évaluation est permise sous LSFin.
Dans les deux juridictions, si le client n’a pas assez de connaissance, il peut être éduqué par un conseiller pour avoir accès à des produits plus complexes.
Enfin, MiFID II requiert des questions spécifiques afin d’évaluer l’expertise financière. Pour chaque instrument financier proposé par l’institution financière, le client doit indiquer la moyenne et le montant de ses transactions passées.
Il n’y a aucune exigence spécifique sous LSFin pour évaluer l’expérience financière.
L’évaluation des préférences en matière de durabilité sous LSFin et MiFID II
En 2022, l’évaluation des préférences en matière de durabilité est devenue obligatoire sous MIFID II.
Cela signifie que les entreprises financières doivent poser des questions à leurs clients sur leur volonté de poursuivre des objectifs sociaux ou environnementaux dans leurs investissements. Ces préférences en matière de durabilité doivent être prises en considération dans la recommandation financière.
Il n’y a aucune obligation encore sous LSFin d’évaluer les préférences ESG des clients. Seules des recommandations ont été publiées à ce jour sur le le sujet.